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Crises au Liban : Les jeunes prennent la parole !
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Crises au Liban : Les jeunes prennent la parole !
Basé sur place, le SIF a interrogé plus de 1 600 jeunes Libanais, mais aussi réfugiés syriens et palestiniens, pour mieux comprendre l’impact des crises économique, politique et sécuritaire qui impactent leur quotidien, et leurs perspectives d’avenir. Les résultats, soutenus par des témoignages, sont à découvrir dans notre document qui analyse l’étude. Force est de constater que les jeunes, au Liban, sont très inquiets pour leur avenir, et s’interrogent fortement sur leur insertion professionnelle.
Depuis 2019, le Liban est frappé par une crise économique d’une gravité sans précédent. Le taux de chômage dépasse le niveau extrêmement élevé de 30 %, et selon la Banque Mondiale, c’est désormais plus de 80 % de la population qui vit sous le seuil de pauvreté ! Sur le terrain, les équipes du Secours Islamique France (SIF) constatent chaque jour les conséquences d’une situation devenue critique, notamment pour les jeunes, en panne d’espoir et contraints de s’adapter aux opportunités qui s’offrent à eux plutôt que de poursuivre leurs réelles aspirations.
Pour porter et amplifier leur voix, notre ONG a mené en cette année 2025 une enquête avec l’Institut de sondage Elka Lebanon, avec le soutien du Ministère français de l’Europe et des Affaires étrangères. Plus de 1 600 jeunes âgés de 18 à 25 ans, Libanais mais aussi réfugiés Syriens et Palestiniens, ont accepté de partager leurs points de vue et leurs perspectives en matière d’inclusion sociale et économique. Les résultats mettent en évidence des pistes d’action et des solutions fondées sur les expériences et les priorités exprimées par les jeunes eux-mêmes.
QUELQUES ENSEIGNEMENTS MAJEURS
L’accumulation des crises, facteur majeur de fragilisation
• 82 % ont été directement affectés par les dernières crises (déplacements, perte d’emploi, interruption d’études…).
• Ils sont 70 % à avoir dû se déplacer à cause du conflit avec Israël en 2024, ce qui a perturbé leur scolarité ou leur vie professionnelle.
• 89 % des interrogés ont expliqué n’avoir reçu aucune aide lors de la crise provoquée par les bombardements de septembre et novembre 2024.
Un accès difficile et inégal à l’éducation
• 55 % des jeunes interrogés sont scolarisés ou en formation, mais seulement 24 % des Syriens, contre 79 % des Libanais. Les obstacles majeurs cités sont le coût de transport, le manque de revenus des familles, les barrières administratives liées au statut légal (lié à leur situation en tant que réfugiés, à leur accès aux documents légaux, à la résidence ou à la citoyenneté).
• 1 jeune sur 4 n’a pas d’accès aux services éducatifs. Une immense majorité dénonce une dégradation des écoles publiques et l’absence d’adaptation des programmes au marché du travail.
• 61 % des jeunes déclarent que l’absence de documents administratifs constitue un obstacle à l’éducation et à la formation.
Un accès difficile au marché du travail, marqué par des inégalités de genre
• Le chômage touche 39 % des jeunes qui recherchent du travail, avec un pic à 49 % chez les Syriens.
• 80 % des jeunes évoquent le coût de la formation et les bas salaires comme des problèmes majeurs.
• Le manque d’expérience professionnelle crée un cercle vicieux : 78 % des jeunes en parlent comme du frein principal à l’embauche.
• L’emploi à temps plein concerne 57 % des hommes… mais seulement 26 % des jeunes femmes.
• Près de 1 jeune sur 3 compte parmi ses connaissances au moins une personne tombée dans la délinquance, conséquence du manque d’opportunités.
Bien-être, sécurité et santé mentale : des signaux d’alarme
• 42 % des jeunes se sentent en insécurité ou menacés, dont 5 % craignent pour leur intégrité physique.
• 54 % perçoivent l’état d’esprit général des jeunes autour d’eux « mauvais » ou « très mauvais ».
• Lorsqu’on leur a demandé leur avis sur leur situation économique, politique et sécuritaire actuelle au Liban, la majorité des jeunes (51%) juge leur situation négative ou très négative.
L’accès aux services essentiels, un problème majeur
• 1 jeune sur 3 n’a pas accès aux soins de santé, à l’éducation, aux services sociaux ou au soutien psychosocial.
• Seuls 46 % des jeunes Libanais ont un accès complet aux soins de santé.
• 89 % des jeunes disent n’avoir reçu aucune forme d’aide lors de la dernière crise.
Cohésion sociale : les jeunes s’accrochent, malgré souffrances et obstacles
• 89 % estiment que les autorités ne les écoutent jamais quand ils expriment leurs besoins, leurs inquiétudes ou leurs opinions, ce qui reflète un profond sentiment d’abandon.
• 76 % des jeunes ont des amis d’autres nationalités, un signe d’ouverture malgré des tensions communautaires.
• 95 % des jeunes Palestiniens expliquent peiner à s’intégrer car ils se sentent discriminés, notamment dans l’accès aux formations et à l’emploi.
MALAISE DES JEUNES AU LIBAN : DES TEMOIGNAGES ELOQUANTS
1. Le fort coût de la vie qui empêche d’étudier
« Je ne suis pas allé à l’école pendant un mois car mon père ne pouvait pas payer le transport. »
Jeune syrien
2. Les tensions communautaires
« Quand nous parlons avec un accent syrien, le harcèlement commence, alors nous évitons les élèves libanais et nous nous isolons. »
Jeune syrien
3. La scolarité des réfugiés jalonnée d’incertitudes
« Chaque année, nous sommes sur le qui-vive, attendant que les élèves libanais s’inscrivent pour que nous puissions nous inscrire. »
Jeune syrien
4. La pauvreté, barrière à l’éducation
« Ils augmentent les frais de scolarité à chaque semestre, où sommes-nous censés trouver l’argent ? Il n’y a pas de travail. »
Jeune palestinien
5. Le désastre des coupes budgétaires dans l’aide internationale
« Après la baisse de l’aide internationale, nous avons des problèmes financiers pour continuer nos études. »
Jeune syrien
« Nous ne savons pas ce que nous ferons si les services de santé de l’ONU s’arrêtent. »
Jeune palestinien
6. Le décalage entre les études et le marché du travail
« J’ai étudié la climatisation mais je vends du poulet, c’est ce qui est disponible. »
Jeune palestinien
7. La résignation à accepter des emplois informels et sous-payés
« Si vous travaillez maintenant, vous recevez le salaire minimum parce que le travail est illégal, mais que pouvons-nous faire ? Nous devons accepter la réalité. »
Jeune syrien
8. Le mal-être face à l’avenir
« Il n’y a aucun espoir dans ce pays. »
Jeune libanais
9. La tentation de la migration, comme ultime recours
« Il n’y a aucune solution, à part rejoindre l’Europe. »
Jeune syrien
10. Les institutions, synonymes de désillusion
« Est-ce qu’il existe des institutions publiques s’intéressant à nous en tant que citoyens ? »
Jeune libanais
11. Un contexte politique et des tensions sécuritaires qui font peur
« Nous espérons que les guerres ne nous atteindront pas. »
Jeune syrien
12. Une jeunesse résignée
« Nous doutons que l’État puisse redresser la situation. »
Jeune libanais
13. Un fort sentiment de ne pas être pris au sérieux
« Ils disent que nous ne sommes que des enfants qui ne savons rien. »
Jeune palestinien
LES RECOMMANDATIONS DU SIF
Toutes les solutions que nous proposons sont à retrouver dans le document, enrichies de détails supplémentaires. N’hésitez pas à la consulter.
1. Veiller à ce que tous les programmes humanitaires incluent explicitement les jeunes Libanais, Syriens et Palestiniens, quel que soit leur statut national, légal ou de résidence.
2. Supprimer les obstacles financiers à l’éducation et la formation pour les familles via des bourses ou des programmes de renforcement des moyens d’existence afin de financer l’éducation (frais de scolarité, transport, matériel…).
3. Renforcer les capacités des systèmes éducatifs et de formation professionnelle pour la planification et la réponse aux crises, afin de garantir, à tout moment et dès les premières phases d’une crise, la continuité des opportunités d’éducation et de formation pour toutes et tous.
4. Adapter les programmes scolaires et les formations professionnelles aux réalités du marché du travail et faciliter l’accès à ces formations pour tous via un soutien technique et financier direct, en tenant compte des secteurs où les barrières liées à la nationalité sont les moins fortes.
5. Soutenir les micros, petites et moyennes entreprises (MPME) pour améliorer l’employabilité et créer de nouvelles opportunités pour les jeunes au Liban, à travers des mesures de relèvement à court terme et des réformes structurelles à long terme, en ciblant également les secteurs où les barrières liées à la nationalité sont moins importantes.
6. Favoriser l’insertion professionnelle des femmes en travaillant sur les perceptions et en mettant en œuvre des mesures anti-discrimination pour réduire leur taux de chômage et améliorer leur accès aux différentes opportunités.
7. Améliorer l’accès aux services de santé mentale et de soutien psychosocial (SMSPS) pour les enfants et les jeunes.
8. Développer des programmes de stabilité sociale pour réduire les tensions intercommunautaires.
9. Assurer la participation de tous les jeunes aux processus de décision qui les concernent directement, mais aussi plus largement sur les questions d’intérêt général.
ARTICLES LIÉS
En collaboration avec l’AFD et le Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, le Secours Islamique France a mené, au Liban, un projet de grande envergure pour soutenir des jeunes femmes sans ressources dans leur quête d’insertion sociale et professionnelle. Les actions liées sont à découvrir dans cet article pour une vision globale, et dans celui-ci pour plonger au cœur de succès-stories. Malheureusement, ce projet est en danger, conséquence des coupes drastiques dans l’aide publique au développement de la France, contre lesquelles nous avons tiré la sonnette d’alarme à de multiples reprises, seuls, ou au sein de collectifs tels que Coordination Sud.
AUTRE CAS D’ÉTUDE : PAKISTAN, JEUNESSE ET CHANGEMENT CLIMATIQUE
Le Secours Islamique France a mené au Pakistan, en mars et avril 2025, un sondage dans le même esprit qu’au Liban, auprès de jeunes de 1 800 jeunes de 14 à 25 ans, essentiellement autour des problématiques liées au dérèglement climatique : leur pays est l’un des plus touchés au monde. Le document, réalisé avec IPSOS et le soutien du MEAE, s’intitule Les jeunes pakistanais ont la parole, les impacts et les solutions aux déplacements internes liés aux catastrophes et aux changements climatiques. Il est également disponible en ligne, via notre site internet.


