AU CŒUR D’UNE MARAUDE SOCIALE DU SECOURS ISLAMIQUE FRANCE

En 2023, selon le rapport de la Fondation Abbé Pierre, les personnes sans-abri sont 300 000 en France, soit 30 000 de plus qu'il y a un an. La grande précarité ne cesse donc de gagner du terrain, une situation alarmante contre laquelle le Secours Islamique France contribue à lutter. Mobilisés, nos travailleurs et nos bénévoles vont directement à la rencontre des plus précaires au fil des rues de Seine-Saint-Denis : vivez de l’intérieur l’un des principaux dispositifs d’aide déployé par notre association dans notre pays. 

Le bruit du moteur du véhicule utilitaire du Secours Islamique France (SIF) résonne dans la nuit. Au tableau de bord, l’horloge indique 19 heures, un soir glacial de décembre. La voiture de service quitte le local du Secours Islamique France (SIF) à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis). Rachid, travailleur social, part en maraude sur les routes du département pour porter secours à des personnes sans-abri, en difficulté ou isolées. Le parcours préétabli, qui se fait en lien avec le « 115 », est long d’une trentaine de kilomètres.  

« C’est surtout le lien social qui les intéresse [les personnes sans-abri] »

Ce soir-là, il est accompagné d’Abir, une jeune bénévole de 24 ans. Une poignée de minutes plus tôt, cette étudiante en ressources humaines a chargé le coffre de 76 repas chauds. « C’est surtout le lien social qui les intéresse. Parfois, certains ont la larme à l’œil et nous remercient chaleureusement », explique Abir, engagée au sein de la #TeamSIFBénévoles du SIF depuis maintenant 5 ans.

Dans la foulée, elle sort du véhicule et va rejoindre Nelly. Cette sexagénaire sans-abri attend patiemment les maraudeurs sous un abribus, malgré une température glaciale d’à peine 0°C. « La première fois que j’ai rencontré Nelly, j’avais encore un appareil dentaire, sourit la bénévole. Pendant les maraudes, on apprend à connaître les gens. Au fil du temps, on crée une véritable amitié. On est aussi là pour les soutenir moralement. »

« On crée une véritable amitié. On est aussi là pour les soutenir moralement »

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Abir s’apprête à charger la voiture avec des packs d’eau

Ce soutien moral et social mais aussi alimentaire est justement ce que sont venues chercher Malika (50 ans) et Cathy (45 ans) en rejoignant Abir, Rachid et Nelly. « Quel froid de canard ! », s’exclame ainsi Cathy, qui a plongé dans la dépression et le doute après avoir perdu son emploi de vendeuse en boulangerie. « On a un sixième sens, poursuit-elle. On sentait que le SIF allait arriver. Vous nous êtes d’une très grande aide… »

« Les gens du SIF me redonnent de l’espoir »

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Le SIF crée du lien social avec les bénéficiaires

Cet enthousiasme est partagé par son amie, qui ne cherche pas à retenir ses larmes en racontant son histoire. « Je suis divorcée, explique Malika. Mon ex-mari est parti en laissant 24 000€ de loyers impayés. Je me suis donc retrouvée à la rue. Je travaillais dans la restauration, je ne trouve plus rien à cause du coronavirus. J’arrive à gagner un peu d’argent en faisant le ménage, mais pour l’instant je dois vivre avec 420 euros de RSA. J’en donne 200 à mes enfants, il ne me reste pas grand-chose. C’est vraiment difficile, discuter avec les gens du SIF me redonne de l’espoir. S’ils n’étaient pas là, ce serait bien triste… »

« Si on ne passe pas [faute de bénévoles] c’est un vrai manque pour les bénéficiaires »

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Les bénévoles du SIF s'apprêtent à distribuer 76 repas chauds à des personnes sans-abri

Le SIF apporte donc un soutien précieux à Nelly, Malika et Cathy. C’est d’ailleurs le cas pour tous les bénéficiaires, très déçus quand le SIF est contraint d’annuler la maraude, faute de bénévoles disponibles à l’heure et au jour dit. « On se sent très attendus, confirme Abir. Si on ne passe pas, c’est un vrai manque pour les bénéficiaires, ils nous le rappellent à chaque fois. Beaucoup d’entre eux nous font confiance, ils se confient. Certains ne veulent pas que leur famille sache qu’ils sont à la rue. On est les seuls avec qui ils peuvent évoquer leurs problèmes. Cela les soulage. Quand l’un d’entre eux s’en sort en trouvant un emploi ou un logement, c’est un vrai bonheur. Nous, les bénévoles, sentons alors qu’on a fait quelque chose de bien et d’utile… »

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Un moment de partage entre une bénévole et un bénéficiaire

Quelques kilomètres plus loin, au cœur de Saint-Ouen, c’est cette fois-ci un groupe d’hommes qui attend l’aide alimentaire du SIF. Plusieurs appartiennent à la même génération qu’Abir. « Quand je rencontre des sans-abri de mon âge, j’essaie de les conseiller, souligne la bénévole. Souvent, ils sont tombés dans la précarité après avoir été expulsés par leurs parents, ils n’arrivent pas à trouver de travail et de toit. On discute de solutions potentielles, cela leur permet de prendre du recul… »

Un numéro de téléphone à disposition des bénéficiaires

La distribution terminée, le véhicule reprend la route. Le silence est brisé par un appel sur le smartphone du SIF. Au bout du fil, un bénéficiaire. « Le 115 communique notre numéro à des gens dans le besoin, décrypte Abir. Ce monsieur nous a appelés pour nous dire qu’il a faim, et nous a demandé si on pouvait passer le voir. On va donc faire un détour pour lui porter secours… » Une étape de plus, donc, à effectuer dans une maraude qui se terminera finalement sur le coup de 22 heures...

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Le SIF apporte du réconfort aux sans-abri